Psst meuf. Non pas là ; regarde plus bas. Oui, là. C’est bon, panique pas. C’est juste moi, ton poil pubien sur lequel tu t’apprêtes à t’acharner – ne mens pas, je sens déjà les effluves doucereusement chimiques de la cire Monop’. En général, quoi que tu en dises, je ne la ramène pas, je suis plutôt discret. Mais à situation désespérée, mesure désespérée.
Suspends ton geste assassin, pose-toi 5 minutes et explique-moi, mon petit bulbe pileux a du mal à saisir. Pourquoi tant de haine ? L’acharnement de Croisé que tu mets à m’éradiquer, l’arsenal déployé pour y parvenir… Haine, oui. Mais haine d’autant plus injustifiée qu’arbitraire et discriminatoire, au vue des soins hors de prix que tu prodigues à ta tignasse (karma oblige, avec toutes les saloperies que ton cuir chevelu ingurgite, faudra pas t’étonner de le voir développer un nouveau type de cancer. Le viol capillaire se paiera, lui aussi).
J’ai osé espérer qu’au vu des discours actuels sur la libération du corps féminin de tous les méchants diktats patriarcaux et ta propension au féminisme d’apparat, tu allais revoir ta position de Mengele de la fourrure. Et puis j’ai frémi en t’entendant cyniquement démonter la dialectique des amies de la pilosité libre. Le gain de temps permis par l’absence d’épilation ? Argument « complètement à la rue ». « Du temps pour quoi ? » tu as dit. « Genre tu vas te réveiller sur ton lit de mort et te dire : « Putain, avec le temps que j’ai passé avec un rasoir, j’aurais pu résoudre le théorème de Goodstein et le conflit israélo-palestinien pour le dessert » ». Lancée sur ta démo sacrilège, tu as continué : « et puis faut arrêter avec l’impératif du naturel. Ça aussi c’est un moyen de contrôle. Personne n’est naturel. Personne ne l’a jamais été. Les castes dirigeantes ont toujours fait valoir leur pseudo-naturel comme la preuve irréfutable de leur supériorité face au reste de la plèbe. ». Et le coup de grâce : « Considérant le trafic humain, la pilosité féminine c’est un VRAI sujet. Et puis bon, je ne suis pas tout le temps d’accord avec l’autre hystéro d’Azealia Banks, mais là elle a raison : les poils, c’est dégueulasse ».
Dégueulasse ? On en est là ? Laisse-moi te rappeler quelques vérités, ma petite. Malgré tes précédentes perles rhétoriques, ça ne te met pas la puce à l’oreille que dans la totalité des pornos que tu t’enfiles – avec une régularité inquiétante – les actrices aient une tonsure à la place de la chatte ? Pareil pour les autres avatars porn soft de la publicité, média et culture de masse, toujours en 1ère ligne quand il s’agit d’entretenir dans l’inconscient collectif une image inatteignable de la femme parfaite… Résolument imberbe. Mais à part ça non, pas de souci avec le poil. Ton argumentaire sur l’hygiène ? Mais meuf, j’ai été inventé par mère nature pour ça. Et puis soyons honnêtes : poil ou pas poil, après une journée à macérer dans des jeans, ce n’est la marée fraîche pour personne. Stop aussi au délire « Le sexe, c’est teeellement mieux épilée ». Mais c’est quoi cette lubie de pédophile non assumé ? Je réalise bien que ton monde dérive toujours plus vers la chochotterie aseptisée, mais jusqu’à preuve du contraire personne n’est mort d’un poil coincé dans le gosier. C’est le métier qui rentre. Only the brave.
Attention mademoiselle, je ne manifeste pas non plus pour une pilosité estampée jungle en jachère ; mais il y a un entre-deux atteignable entre l’hypertrichose et le look post-chimio. Me maltraiter, c’est te maltraiter toi-même ; mais j’en viens parfois à me demander à quel point tu n’aimes pas la douleur de l’épilation. Des fois, tu m’inquiètes grave. Du coup, par peur, par dépit, par vengeance un peu, je me mets en mode souterrain, je m’enfouis, je m’incarne. Un jour, tes maltraitances te conduiront tout droit à l’hosto. Et t’auras l’air bien fine avec les cuisses écartées, la honte suintant sur ton visage et un laser en train de lacérer tout le bazar sous le regard médical hilare/libidineux (j’imagine le pitch du médecin chef face aux internes : « Et là, vous avez un cas typique de connerie aiguë. Rincez-vous l’œil avant que ça ne ressemble à un cratère turgescent »).
Voilà, j’en ai fini. Cette supplique n’avait qu’un but : te faire revenir à la raison. À Dieu ne plaise que tu ne t’enlises jusqu’au point de non-retour dans ta relation destructrice avec ta cire Monop’.