Difficile d’oublier le magasin Marilyn Feltz ainsi que ses propriétaires. Si tu es désespérément en quête de l’atmosphère berlinoise à Paname (et que tu t’es déjà bien fait entubé par le Udo ou pire, le Wanderlust), c’est dans cette boutique de vêtements qu’il te faut impérativement traîner tes guêtres. Un pas à l’intérieur de cette bulle, et c’est le retour dans ton bar vintage favori de Boddinstrasse ; en mieux, car à la croisée entre un Paris oublié et un Berlin regretté, atypique, beau et féminin. Quant à Marilyn, elle s’approche d’une sobre et moderne Jessica Rabbit, quelque chose d’à la fois rétro sans être square, jeune et intemporelle. Elle vient de Paris et a appris à aimer la capitale durant ses nombreux séjours sur la côte ouest des USA. Le glamour fantasmatique bien-de-chez-nous, elle le ramène d’Outre Atlantique. Son souci du détail et son goût prononcé pour la farfouille, elle les tient de Berlin, ville où elle a suivi son homme, Alexis, batteur et producteur de concerts. De Berlin, plus qu’un ensemble disparate et superficiel de souvenirs, chacun a ramené un état d’esprit : le coté farfouille et solide pour Marilyn, la rébellion alternative tranquille pour Alexis. De fait, des vêtements à la boutique, tout dans la marque promeut une synthèse bigarrée entre les deux – inconciliables paraît-il – capitales.
Côté style, le condensé d’influences n’est pas nécessairement à chercher du côté de la mode. Outre le goût évident pour le vintage, le glamour et une féminité assumée, il y a du jazz, du punk, des vieux cafés, des danses enfiévrées, de l’imagerie cinématographie noire… Il y a beaucoup de mythologie dans ces vêtements. Indéniablement sexy et subtiles, les pièces fusionnent à la fois le mystère insolent féminin parisien et la robustesse pure de Berlin. Un zeste prononcé d’énigme sensuelle relevé par l’intégrité de la confection, le made in France flânant avec la deutsche Qualität pourrions-nous dire.
Parce qu’au delà du style lui-même, la confection chez Marilyn Feltz, plus qu’une marque de fabrique, est unstatement. Confectionner des vêtements appartient à une dynamique éthique. Alexis a grandi dans le nord de la France vers Cambrai. Il a vu les usines de broderie fermer les unes après les autres, les parents de ses amis au chômage, et pour ceux qui avaient encore un travail, le cantonnement à des tâches répétitives et pénibles, d’autant plus pour ces artisans ayant œuvré sous l’égide de couturiers de génie. Faire du made in France, ne proposer que des matières nobles, fiables et travailler avec ces artisans-artistes sont autant de dimensions essentielles à la marque, tout comme le fait de gérer entièrement l’ensemble des aspects du métier. Cela leur occasionne une prise de risque maximale et pas mal de nuits blanches, mais également une liberté quasi totale de choix et de direction, ainsi que la satisfaction du non-compromis. Comme le remarque Alexis, c’est un acte de résistance, moins bruyant que certains, mais de résistance néanmoins : résistance face à la grande bouffe des magasins de prêt-à-porter, contre leur méthode de production, contre l’uniformisation du vêtement par le bas (sans tomber dans une ode frénétique au vintage) ; entre l’esprit punk libertaire idéaliste et la mode, il n’y a qu’un pas.
Finalement, Marilyn Feltz, c’est cette capacité de synthèse entre plusieurs cultures, fortes individualités, et les impératifs parfois contradictoires hérités de ces parcours de vie. Une synthèse impressionnante, un combat tranquille : de l’hyper féminin rétro subtile, robuste, sublimé par un travail d’orfèvre oublié. Paris, Berlin, et bien plus.
Hello Marilyn, petite présentation ; tu viens plutôt du monde de la musique à la base ?
Oui, tout comme Alexis. En fait mon premier boulot c’était journaliste en musique, pour Rock & Folk, Rock Mag… J’ai débuté très jeune, j’étais juste une fan de musique qui aimait écrire. J’ai commencé à rédiger des chroniques de concerts, de disques, des interviews… Ensuite j’ai monté un magazine avec deux autres mecs, et je suis partie vivre à Los Angeles. Alexis était musicien, batteur plus précisément. C’est d’ailleurs pour ces raisons qu’il est allé vivre à Berlin, il jouait avec 3 ou 4 groupes de punk là-bas, il a bossé aussi pour le Printemps de Bourges… Donc à la base, nous venons vraiment du monde de la musique. Après un certain temps, je suis revenue à Paris et c’est là que j’ai commencé à arrêter le journalisme pour me consacrer à d’autres passions.
Tu avais fait le tour ?
Faire le tour de la musique ? Non, jamais. C’était plutôt pour des raisons pratiques. À l’époque où j’étais journaliste à L.A., les maisons de disque avaient plein d’argent et de billets d’avion à offrir. Je n’avais pas de visa, je faisais des allers-retours en permanence. J’aimais énormément ce mode de vie, mais je m’étais également fixée une limite ; à un moment il faut rentrer. Et de manière assez surprenante, moi qui n’aimait pas trop Paris adolescente, c’est en vivant à L.A. que je suis tombée amoureuse de notre capitale. Je me suis rendue compte de ce que signifiait être parisienne en vivant à L.A. parce que cette ville fantasme sur Paris, et ce depuis les années 20. Toute jeune, dès que je disais que j’étais parisienne les gens me regardaient avec des étoiles dans les yeux, alors que moi j’en avais presque honte. J’adorais L.A. pour son côté calme, sans saison… Mais en contrepartie, la ville bouge lentement. Tu n’as jamais fait le tour de Paris ; où alors, quand tu en as fait le tour, tu n’as plus qu’à recommencer parce que la ville a changé entre temps. Donc je suis rentrée en ayant appris ailleurs à apprécier ces particularismes que nous avons en terme de culture et d’esthétisme. Et je me suis rendue compte que ce fantasme américain sur Paris représentait un peu ce que j’avais envie de vivre : ce glamour, garder un regard naïf et émerveillé sur mon environnement, ne pas me satisfaire de simplement enfiler mon jogging et avoir un rythme métro-boulot-dodo… En revenant, j’ai redécouvert toutes ces choses que je ne voyais plus parce que j’avais grandi dedans. Il faut garder son sens de l’attention aux détails. C’est pareil en étant allée à Berlin : la ville a beau être immense, il y a cette espèce de proximité, de méandres, ce mystère. C’est ça qu’il faut essayer de continuer à entretenir en tant que parisienne. Indirectement, j’essaie de le reproduire dans mes fringues ; j’aime bien le glamour mais je veux garder aussi le côté énigmatique. Cela ne m’intéresse pas de faire du sexy actuel, court et transparent ; je couvre au maximum. Mes jupes sont rarement au dessus du genou, j’aime bien les cols bateau mais dans ce cas-là je vais faire un petit décolleté dans le dos, ou je vais décolleter plus sur le coté… C’est mon penchant Paris-Berlin.
Pourquoi Berlin ?
Je suis partie à Berlin pour rejoindre Alexis qui y produisait des soirées et qui jouait dans des groupes. Nous avons beaucoup chiné là-bas ; je ne t’apprendrai rien en te disant qu’en terme de shopping, la ville est assez limitée comparé à Paris, du moins dans ses structures « modernes ». Par contre les brocantes, les marchés extérieurs, les shops vintage et d’equiloshop… À Berlin je me suis vraiment amusée à chercher des petits trésors, et j’en trouvais plein ; j’avais accumulé tout plein de choses juste parce que j’en appréciais tel ou tel détail. Je trouvais une robe qui était coupée comme je voulais ou un point de couture qui me plaisait, que je ne connaissais pas, et comme ça ne coûtait rien du tout j’achetais. En même temps j’apprenais les noms des plis, des points… Quand nous sommes revenus à Paris, j’ai tout de suite retrouvé un travail de bureau, ça ne me plaisait pas du tout. C’était dans les accessoires, des trucs produits en Asie, cheap à fond ; ça a au moins eu l’avantage de renforcer mon goût pour l’objet de valeur, unique. Quand j’ai arrêté ce travail, j’ai dit à Alexis : « Vas-y, tentons ! ». Et vu que nous avions plein d’idées accumulées dans le coin de notre tête, c’est sorti d’un coup. Nous avons réussi à nous faire notre réseau très rapidement, des gens hypra qualifiés. Ce ne sont pas des jeunes en fait ; le plus vieux a 76 ans, il bossait pour Dior quand il était jeune, il a vu les débuts de Castelbajac, il connaît tout. Nous avons un mode de communication très amusant : il m’arrive de ne pas avoir les termes exacts sur les points que je veux. Alors je lui ramène des vieilles robes que j’ai achetées aux US ou à Berlin, je les lui montre. Il éclate de rire, il me dit que ça fait des siècles que personne ne lui avait demandé ce machin. Du coup, il me les fait mieux que personne car c’est quelque chose qu’il a en lui : il a appris son métier en faisant les coupes Newlook des années 50, les costumes un peu à la Marilyn Monroe, il était ado pendant cette période-là, il a appris avec sa mère. Il bosse toujours comme un dingue, c’est un passionné… Quand je lui demande de me faire une jupe ballon style année 50, il est comme un fou, il me la fait dans la journée.
Berlin influence-t-elle ton travail ?
En terme de mode, Berlin n’est pas à l’affût comme Paris. On y veut quelque chose de pratique, d’utile, sans superflu. Il n’y a pas ce délire de consommation à outrance, j’ai l’impression que l’achat est vraiment déclenché par l’utile, à moins d’avoir vraiment flashé sur un vêtement. Je peux me tromper mais c’est la vision que j’en ai. Et le fait d’avoir chiné dans les brocantes, les parcs… J’ai vraiment appris ça à Berlin : farfouiller, chercher le trésor, dans des lieux qui ne paient pas de mine. Je fais beaucoup moins les brocantes à Paris. À Berlin je trouvais toujours des petits trésors, des petites broches, à des prix très abordables. Je n’y suis restée que 2 ans mais j’ai l’impression que là-bas les gens n’ont pas envie de suivre les mouvances, c’est très intemporel, tu peux porter les mêmes vêtements 5 ans sans soucis si tout est en bon état, ton style ne change en fonction de rien, si ce n’est ton propre goût. L’intemporalité, la robustesse, je les tiens de là-bas.
L’attention aux détails également. Il y a peut-être 1 femme sur 100 qui le verra, mais c’est ma petite satisfaction. Parfois il y a des dames qui rentrent, retournent les robes dans tous les sens, je les laisse faire, je sais exactement le petit truc qui va les amuser… Tout le monde ne le voit pas, mais bon. C’est comme les femmes : c’est un petit jeu du minutieux. Par exemple, le jour où nous avons ouvert la boutique, une dame rentre, très chic cavalière. De manière assez hautaine, elle me déclare : « Je vois que vous faites des lavallières. Moi je n’achète les miennes que chez Saint-Laurent ». Mais finalement, après avoir examiné ma lavallière, sans même l’essayer elle m’a dit qu’elle en voulait une de chaque couleur. Et cela fait plaisir quand une cliente remarque et est sensible au petit détail. Dans le même registre, nous avons des employés d’atelier qui passent régulièrement ; la phrase qu’ils répètent le plus c’est : « C’est propre, très propre ». Toutes ces petites attentions aident à prendre confiance en soi quant à la qualité de ce que nous proposons.
Et enfin, il y a le côté solide de Berlin, pas du chiqué, on ne la leur fait pas à l’envers. Je fais des crash tests sur mes vêtements. L’une des premières pièces que nous avons produite, c’est la jupe crayon. Perso je n’en trouvais pas qui m’allait, avec mon corps en sablier. Donc nous l’avons faite pour les femmes chaloupées, et je voulais que ça tienne. J’avais prévenu l’atelier : « Mettez des fils, renforcez le tout, il faut un zip en béton ». J’ai fait des crash tests pendant des semaines en me disant que j’allais réussir à la craquer ; et non, elle a tenu. Je porte toujours le proto maltraité, c’est un Jacquard assez chic, il y a des fils de soie dedans, des fils métallisés. C’est ça mon héritage berlinois : un vêtement à l’épreuve de la vie tout en restant très féminin.
La qualité devient un peu une marque.
Oui, je le remarque surtout dans les achats online. La première commande est un peu compliquée, la cliente ne peut pas essayer, c’est un investissement… Nous offrons les frais de port, notamment parce que nous sommes sûrs de nous. C’est un statement : «Nous vous offrons les frais de port, vous ne serez pas déçus ». J’ai souvent eu des femmes qui m’ont acheté 5 pièces d’affilée par la suite : elles ont vu que ça fonctionnait, elles ont confiance, et si ça ne va pas, j’échange. C’est super de voir qu’une femme qui achète une robe revient, se fidélise. C’est un compliment immense.
Si tu devais faire une comparaison, tes clientes sont plutôt françaises ou allemandes ?
Allemandes.
C’est marrant. Je suis tout à fait d’accord avec ce coté très pratique, où, en développant, les allemandes peuvent avoir du mal à considérer que féminité et féminisme ne sont pas antinomiques par exemple. Mais paradoxalement, quand tu fouilles un peu dans Berlin, ses clubs, ses magasins, ses cafés, il y a, flottante, cette féminité fantasmée. Ce décalage… Limite plus féminines que nous.
Complètement. Les clientes que j’ai là-bas sont un peu féminines à outrance. Je ne sais pas comment elles s’habillent le jour, mais quand elles s’apprêtent pour sortir c’est un apparat très pin-up. Beaucoup plus que mes clientes parisiennes, ma clientèle berlinoise est très lookée. Ce sera l’occasion d’en discuter durant le cocktail. Ça nous faisait plaisir, ce petit engouement berlinois. Tu sais il y a des bals à Berlin, moi j’aimais bien aller à Klatschen… Nous aimerions avoir ces dames d’un certain âge qui vont écouter du jazz dans les bars à cocktail de Berlin…
Pas été trop dur de trouver des gens avec qui travailler ?
Marilyn : En théorie cela peut s’avérer compliqué. Mais pour nous, ça a été assez rapide. Nous avons eu de la chance, parfois dans la vie les connexions se font naturellement. Nous sommes tout de suite tombés sur des individus très cool, ce qui n’est pas simple dans la couture à haut niveau, un cluster hyper fermé. Les gens ne veulent pas perdre leur temps, donc s’ils n’ont jamais entendu parler de toi… Il faut faire ses preuves. C’était évident que nous étions nouveaux dans le métier, mais nous avons piqué leur curiosité par le challenge, ils ont vite vu que nos créations requéraient du savoir-faire. Par exemple, pour la robe Marylin, nous voulions travailler avec un très gros atelier, Lener Cordier, à Hazebrouck. Même si pour eux ce type de commande demande beaucoup d’heures de travail et ne leur rapporte financièrement pas grand chose (il est bien plus rentable de faire à la chaîne), ils ont exceptionnellement accepté de produire le proto, parce que selon eux, ça allait redonner de la motivation et du baume au cœur à leurs couturières.
Alexis : Les ouvrières sont à présent cantonnées à un travail assez chiant et répétitif (elles font surtout de la manche, du manteau). Leur responsable pensait que travailler sur cette robe redonnerait la pleine valeur à leur statut d’artisan.
M : Quand nous sommes revenus chercher le proto, les dames étaient au garde-à-vous ; c’était un peu étrange. Elles nous ont remerciés de leur avoir donné la robe à faire, elle avait été l’attraction de l’atelier durant toute la semaine. J’étais hyper contente, c’est une des raisons principales de mon travail : je suis baba devant ces gens qui ont de l’or dans les mains et dont le talent n’est plus mis à profit. J’étais hyper stressée, mais en fait c’est elles qui nous ont remerciés, en nous disant que personne ne leur avait donné de chose aussi jolie à confectionner depuis un long moment. Je n’osais même pas porter la robe devant elles. Et quand je l’ai essayée je n’arrivais plus à l’enlever, elle était parfaite. Voila ce qui compte : tu arrives dans une usine et tu rencontres ces gens sur-qualifiés, mais avec 0 reconnaissance, surtout dans le prêt-à-porter. Mais nous tenons. Ce sera sur des détails, mais pour nous ça a une signification. Et quand nous allons les voir, même si nous leur demandons de petites quantités, ils prennent tout le temps le temps, ils s’investissent… Rencontrer et s’associer à ces gens un peu oubliés. Il ne faut pas que cela s’arrête.
A : Les gens avec qui nous travaillons nous disent qu’ils collaborent de plus en plus avec des créateurs pour qui la qualité prime, pas la chaîne. C’est aussi une façon pour eux de s’adapter à la nouvelle réalité du métier. Maintenant que tout a été délocalisé, ces ateliers ont perdu leur gros clients. Ils arrivent à résister en travaillant avec plusieurs petits clients. Parce qu’honnêtement, c’est de la résistance, ça a un aspect très éthique aussi de continuer à avancer de cette manière.
M : Ça se retrouve dans ce que tu faisais à Berlin. Tu produisais des groupes de punk et maintenant c’est la couture ! On a ce truc de recherche du petit trésor mais aussi la façon de le faire, alternative. Je ne me sentirais pas à l’aise dans une dynamique de masse, formatée, impersonnelle.
A : Et puis bosser dans ces boîtes-là c’est un peu rébarbatif. Chacun a un petit rôle très défini, tu ne peux rien faire en-dehors. C’est limité. Vu que nous sommes une micro structure, nous sommes obligés de tout faire. De la direction artistique à la promo, le sourcing, les shooting, l’achat de matériels, la négo, gérer les réalités économiques, en passant par le ménage et le choix du papier peint dans la boutique.
M : Nous sommes multi-casquette. Mais c’est aussi pour cela que nous le faisons, nous apprenons tous les jours. Là par exemple, je suis un peu stressée sur la prod, nous avons fini les dessins, les patronages de la prochaine capsule, j’attends les proto. Plutôt que de rester à me morfondre et à psychoter, vu qu’il y a mille trucs à faire, je n’ai qu’à changer de sujet. Pas besoin de ruminer.
A : Il y a ce coté David vs. Goliath. C’est aussi un combat. C’est vrai qu’en y réfléchissant, ça me rappelle beaucoup ce que je faisais avant, essayer de défendre des projets alternatifs différents, pas signés sur des majors. C’est bien entendu difficile, stressant, mais également très excitant et ça t’apporte une certaine paix d’esprit. C’est notre côté punk. Si tu n’es pas un peu fou, tu ne te lances pas dans ce type de projets. Mais il s’avère très agréable d’en arriver à ce genre de conclusion. Parce que c’est tellement triste de parfois te dire que rien de ce que tu fais dans la vie ne sert, que tu travailles pour un système dont tu n’es qu’un micro grain qui n’en a pas grand chose à faire de toi. Pour nous c’est un peu différent, et c’est très agréable de se le dire. Comme c’est bien de se dire par exemple que nous savons d’où proviennent tous les tissus utilisés, nous savons comment ils ont été fabriqués, pour toutes nos pièces. J’aurais vraiment du mal à savoir que ce sont des enfants sous-payés qui fabriquent mes vêtements – sans rentrer dans le débat « Ont-ils besoin de cet argent » –. Au moins cette question-là je ne me la pose pas, et tant mieux.
M : Nous aimons le fait d’entretenir ce savoir-faire dont je te parlais. C’est de l’artisanat, pas de l’industrie. Ce n’est même pas exactement de la mode, dans la définition stricte, puisque nous ne sommes pas à la mode. C’est de l’intemporel. C’est évoluer avec des gens qui ont 50 ans d’expérience, car ces 50 années n’ont pas de prix. Travailler avec ces gens pour qui tout ce que des jeunes comme nous aiment des années 40, c’est du vécu. Des gens pour qui le New Look de Dior, c’était Rock Rock’n’roll. Ça, c’est un vrai plaisir et réussite.
Hello beauties…
La cape « Rita » : j’ai toujours adoré les capes. J’en voulais une qui arrive sous le genou ! Il se trouve que c’était la grande mode cet hiver (Saint-Laurent en a fait une). Celle-là reprenait le coté Bonnie & Clyde 60s, mais pour le clin d’œil anachronique, je voulais un tissu art déco fin des 20s avec des écailles. Elles viennent d’un tisseur des Pays de la Loire, il a hérité sa boîte de son grand-père. C’est une pièce que j’aime bien, elle a été tout de suite repérée, elle est passée à la télé, c’était marrant. Elle fait désormais partie de notre collection permanente !
La robe de soirée ou de mariage « Marilyn » : c’est la robe que j’aurais voulu porter pour mon mariage ! Elle s’appelle Marilyn, son nom la résume bien. Cette robe est montée à Paris, mais le détail en guipure dorée du décolleté est produit dans une petite usine près de Cambrai. La guipure est une jolie broderie posée sur du papier que tu fais ensuite fondre pour ne garder que le dessin. La dentelle a un fond en tulle par exemple. On a demandé au brodeur de nous ressortir ses archives des années 50, et j’ai retrouvé ce magnifique motif dans un de ses vieux cahiers. Il l’a réédité pour nous. Ici, la broderie est faite à la main. C’est le genre de petit détail technique que j’aime bien ! Je voulais aussi que le jupon fasse comme un petit nuage, tout en restant très sobre et pas trop volumineux. Il y a deux jours de travail pour fixer et monter le tout ; de plus, on a travaillé un peu de corseterie. Je la fais sur commande en blanche ou en noir.
La robe de cocktail « Marlène » : la robe décadence des années 20 à Berlin. Je me suis juste inspirée de Marlene Dietrich : grand décolleté, manches kimono, petits cristaux noirs Swarovski, tout plissé dans le dos. Je l’ai confectionnée avec l’ancienne habilleuse de Dalida, qui est maintenant à la retraite ; c’est elle qui m’a fait le patronage. C’est un gros satin, très épais ; au début je la voulais en noir et en or. Et ensuite j’ai trouvé ces incroyables soies kaki et perle blanche. Elle a du succès fou en tant que robe de mariée ! Et certaines femmes l’accessoirisent de façon très Boho chic ! J’aime beaucoup voir comment mes pièces sont adaptées aux goûts de chacune !
La jupe ballon « Frou-Frou Bamboo » : toute simple, mais nous avons pas mal travaillé les plis pour que les volumes ne soient ni trop gros ni trop plats. La doublure est en soie et plissée aussi à l’intérieur, c’est quelque chose que l’on voit rarement. Celle-ci, Dita Von Teese l’a achetée la semaine dernière.
La blouse « Bungalow » : c’est un de nos best ! Tu as des petits boutons cachés dans le décolleté, toujours dans cet esprit de multi fonctions jour/nuit, sage/glam. La journée c’est assez sage, tu peux fermer, tu mets avec une taille haute, c’est vraiment une blouse très typique des années 40s ! Et si tu veux faire un peu plus sexy le soir ou au bord d’une piscine, tu l’ouvres sur le devant jusqu’au nombril ! Elle va à tous les types de corpulences. Cette blouse fonctionne vraiment bien. Les gens sont tout d’abord intrigués par la forme en la voyant sur cintre ; mais il n’y a pas une personne qui l’ait essayée sans l’avoir prise, c’est un peu fou ! Pour l’automne, nous en avons sorti une version en délicat voile doré.
Adresse : 17 passage du Bourg l’Abbé 75002 Paris
Ouverture : du mardi au samedi, de 13h00 à 19h30. Et pour nos amis du reste du monde et de Navarre, leur
e-boutique envoie gratuitement partout !
Crédit photo : Tatiana Gerusova