Valentin

Flickr-CC-Markus Spiske

Je travaille dans un espace de coworking depuis peu. J’en avais marre d’être seule à la maison. L’hiver ça vous tue un travailleur freelance sérieux. L’avantage d’un espace de coworking c’est donc de rencontrer du monde. A défaut d’avoir des collègues vous vous retrouvez avec des coworkers. Webdesigner, traducteurs, vidéastes, le panel du freelance suffisamment payé pour s’offrir le luxe d’un bureau ensoleillé en centre ville. J’ai choisi ce coworking là pour la vue bien sûr, grandes fenêtres plein sud, mais aussi pour le blond du bureau du fond à droite derrière son grand écran. Son sourire quand il m’a dit « hey », son sourire quand il m’a dit « à bientôt j’espère ». Bref. Je me suis engagée pour trois mois…

Je ne savais pas comment l’aborder le blond en question. Après tout, coworkers c’est un peu comme colocs… On se voit tous les jours des heures durant sans échappatoire donc on sait que s’il se passe quelque chose on a intérêt à se marier et faire des gosses sinon c’est l’akwartitude absolue. Encore que, je me rappelle il y a 4 ans je couchais vaguement avec B. qui s’était déjà tapé toute sa boîte m’avait raconté ma pote par qui je l’avais rencontré. J’étais d’autant plus étonnée que B. avait un micro pénis et était de surcroît un très mauvais coup (de surcroît et non en outre car il y a des micro pénis qui font très bien leur boulot mais c’est un autre débat, ou plutôt un autre tuto).

Je ne savais pas comment l’aborder jusqu’à ce qu’il prenne les devants, totalement inconsciemment. Ma boîte mail a fait ting. Jule me transférait un message reçu sur l’adresse mail de Girlshood et qui m’était destiné. Un journaliste freelance suisse souhaite faire un court article sur la tendance nouvelle érotique. Je regarde le mail du journaliste freelance suisse, il a le même prénom que mon beau blond que je sais être journaliste freelance suisse. Je me dis que non, ce serait trop beau. J’hésite. J’hésite longuement. Je le stalke sur linkedin, facebook, twitter, rien à faire je n’arrive pas à être sûre. Sans son nom de famille c’est difficile. Alors je profite de sa pause déj pour aller traîner du côté de son bureau. Une lettre en évidence, c’est bien lui.

Je réponds donc à Valentin qui lui, vraisemblablement, n’a aucune idée de mon identité. Un message empli de sous-entendus qui lui décroche un sourire dès son retour de pause. Jouissif. Je l’observe par-dessus mes lunettes et nous commençons à chatter. Je le vois qui fixe son écran avec envie, se tourne vers la fenêtre pour trouver l’inspiration, trouver les bons mots pour se défendre, se détendre, m’allumer. Le jeu me plaît, d’autant que c’est moi qui mène. J’ai trois longueurs d’avance et lui pense encore gagner.

Il est dix-neuf heures, tout le monde est parti. En même temps c’est vendredi. Tout le monde sauf Valentin qui a l’air de lutter contre l’envie de fuite. Un gros dossier m’a-t-il dit quand on s’est croisés dans la cuisine un peu plus tôt. Je me dis que c’est le moment d’attaquer. Dernière ligne droite. L’article qu’il prépare sur Girlshood, enfin sur les nouvelles érotiques, est sur le point d’être publié, c’est maintenant ou jamais.

« Toujours pas terminé ? »

Je remarque son visage qui s’illumine à la lecture de mon email.

« L’article ? Non mais il sera prêt lundi. »

« Non, le dossier sur lequel tu travailles. C’est vendredi, tu devrais commencer à profiter du week-end à cette heure-ci. »

Son visage se crispe dans un demi-sourire. Il tourne sa tête vers la fenêtre, puis vers le bureau vide, puis vers moi qui continue de taper sur mon clavier comme si de rien était.

« Comment tu sais que je suis toujours au bureau ? »

« Je sens juste que tu es un travailleur acharné, appliqué. Le genre qui aime bien faire les choses. »

« Pas faux… »

Cette fois son visage se détend. Il se renverse dans sa chaise et commence à répondre mais je le coupe immédiatement. Le jeu, toujours le jeu…

« Très belle chemise by the way. »

Cette fois il relève immédiatement la tête. Je plante mon regard dans le sien et enlève lentement mes lunettes. Je les pose sur le bureau.

Il ne sait pas comment réagir. J’espère ne pas être allée trop loin. Je me lève et pars remplir ma bouteille d’eau dans la cuisine. Au moins il aura le temps de digérer l’information. Sa main se pose sur la mienne au moment où je ferme le robinet.

« Tu aurais pu me le dire ! »

« Ça n’aurait pas été aussi drôle. »

« Je me sens con maintenant. »

« Ça n’enlève rien à ton charme. »

Nous retournons nous asseoir, je m’installe dans mon fauteuil, il s’assoit sur le bord de mon bureau. Monsieur tente de retrouver une position dominante.

« Ça fait longtemps que tu écris ? »

« Des nouvelles érotiques ? »

« Tu écris d’autres choses ? »

« Bien sûr ! »

Je réalise qu’il a dit ça pour me vexer. Il me sourit et commence à jouer avec mes lunettes.

« On va prendre une bière ? »

« Tu penses tenir jusque là ? »

Ma réponse l’étonne. Il ne semble pas comprendre… Pour l’aider je déboutonne le premier bouton de mon chemisier.

Même visage que devant son écran, le doute, le questionnement, puis le sourire charmé. Reprenons la partie cher ami…

Je recule ma chaise, écarte les jambes. Je déboutonne le reste de mon chemisier sans le quitter des yeux. Il est toujours assis au bord de mon bureau, il a reposé mes lunettes. Il enlève son pull puis déboutonne lui aussi sa chemise. J’ôte mes bottines, fais glisser mon collant sur mes jambes puis les dépose sur mon clavier. Hiver oblige, il arrête son regard sur mes bas transparents. Je remonte un peu plus ma jupe sur mes cuisses et ôte cette fois ma culotte. Il est toujours en jean, il ne sait plus. Réveille-toi Valentin, on ne va pas y passer la nuit, ça fait déjà deux semaines que j’en rêve moi… Car je savais que c’était possible. Il finit par se réveiller et se lève pour enlever ses chaussures et son jean. Il regarde la fenêtre, les collègues d’en face sont presque tous partis. Il regarde la porte. Il éteint la lumière de mon bureau. Je la rallume. Il se tourne à nouveau vers la fenêtre.

« Un peu d’exhibitionnisme n’a jamais tué personne. »

« Ça ne m’excite pas. »

« Moi si. »

Je le lui prouve en m’approchant de lui, dépose un baiser sur ses lèvres au moment où ma main se glisse dans son caleçon.

« Mais si regarde, toi aussi ça t’excite. »

Je pose ses mains sur mes cuisses, là où mes bas s’arrêtent. Je m’appuie contre mon bureau et l’attire contre moi. Ça y est il réagit. Ses mains cherchent maintenant mes seins sous mon soutien-gorge. Il respire plus fort, oublie la fenêtre et la porte non fermée, nos deux lumières allumées. J’écarte encore un peu plus mes jambes pour l’accueillir. Non on ne va pas y passer la nuit.

Il me soulève de quelques centimètres pour mieux me pénétrer. Mon bureau tremble sous ses coups de reins. Je renverse la tête en arrière tandis qu’il mord à mon cou. Pas mal pour un homme pris par surprise…